Vie municipale
« Cette crise souligne l’apport inestimable des collectivités territoriales »
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© DR / Ville de Tremblay-en-France
Vous avez contracté le Coronavirus, comment avez-vous vécu cette épreuve ?
J’ai eu une forme sévère du Covid-19, mais je ne veux pas m’étendre sur ma personne. J’ai seulement eu beaucoup de chance de m’en sortir. Et je tiens d’ailleurs à souligner la qualité extraordinaire du personnel soignant, et singulièrement celui de l’hôpital privé du Vert-Galant. Je suis attristé par le nombre d’amis qui sont partis et je pense aujourd’hui à toutes les familles endeuillées.
Que dit le coronavirus sur notre époque ?
Il vient confirmer que l’être humain ne peut jamais maîtriser la nature et heureusement ; en revanche, les activités humaines peuvent détruire la planète. Par ailleurs, l’accélération et la massification des déplacements des êtres humains sur la planète, liées au commerce et au tourisme, ont sûrement dû jouer sur la propagation rapide de la pandémie. Il y a probablement d’autres coronavirus qui sont dormants ; pour combien de temps ? Même les plus grands épidémiologistes ne le savent pas.
Tout au long de son histoire, l’humanité a connu différentes pandémies : la peste, la grippe espagnole, le SRAS, le Sida… Le paludisme, par exemple, a tué 400 000 personnes dans le monde l’an dernier. Aujourd’hui, la recherche, si elle était financée à la hauteur des enjeux, trouverait des vaccins à ces maladies. Il faut que les vaccins soient considérés comme un bien commun de l’humanité, et non pas la propriété de quelques laboratoires pharmaceutiques, qui en toutes circonstances profitent de la crise.
Comment la collectivité s’est-elle réorganisée en votre absence et a assumé son rôle durant cette crise ?
Le confinement a été d’une brutalité extrême. Imaginez que dans une pièce, d’un seul coup, la lumière s’éteigne. Toutes les activités sociales, économiques et culturelles ont été stoppées net, les chantiers se sont arrêtés : ceux du parc urbain, du restaurant scolaire de l’école Anatole-France, pour ne citer qu’eux ont pris beaucoup de retard. Malgré tout, l’administration a tenu bon. Avec le concours d’élus très présents et très actifs, nous avons pu assurer la continuité du service public.
Que toutes celles et ceux qui y ont contribué en soient chaleureusement remerciés ! Au niveau social, la première décision prise par mes adjoints et qu’ils m’ont soumise, a été le vote d’une aide exceptionnelle à toutes les familles, sans condition de ressources, dont les enfants fréquentent la restauration scolaire. Cette aide, qui s’élève à 543 000 euros, a été distribuée sous forme de bons d’achats alimentaires à utiliser dans les commerces à Tremblay et dans les environs.
Quelles sont, pour la municipalité, les conséquences immédiates de cette crise ?
Elles s’observent déjà sur le budget municipal. À elle seule, la crise du Covid, qui n’est pas terminée, a pesé 3,4 millions d’euros sur les finances de la ville. D’abord par des recettes fiscales qui ne sont pas rentrées, notamment à cause de la forte réduction de l’activité aéroportuaire : la fermeture des hôtels et des nombreuses entreprises de la zone, a empêché le versement de la taxe de séjour à la ville. Puis, par les dépenses liées à l’achat de produits sanitaires, de masques et de tous les dispositifs pour assurer la distanciation physique. Il faut également compter les dépenses informatiques pour la mise en place de la téléconsultation au Pôle municipal de santé, et du télétravail pour les agents de la collectivité.
La Seine-Saint-Denis a été très durement touchée par cette crise sanitaire…
La région parisienne en général et la Seine-Saint-Denis en particulier sont fortement urbanisées. Notre département est un département où la promiscuité et la densité sont omniprésentes, que ce soit dans les transports publics ou dans les logements, ce n’est pas étonnant que l’on retrouve un taux de mortalité plus élevé qu’ailleurs. Et, on sait bien que beaucoup de Sequano-Dyonisiens exercent les métiers qui se sont révélés essentiels : infirmières, aide-soignantes, caissières, éboueurs, postiers, etc.
Les salariés de ces « petits métiers », comme on dit injustement, qui ont permis au pays de continuer à fonctionner ont été, de fait, les plus exposés au virus. Voilà la raison principale. Et ce n’est sûrement pas, comme je l’ai parfois entendu, que les habitants du département n’auraient pas assez respecté le confinement ! Il faut d’ailleurs rendre hommage aux citoyens d’avoir globalement observé avec beaucoup de sagesse ce confinement. Et le virus est toujours en circulation, c’est pourquoi j’en appelle à la responsabilisation de tous et donc de chacun dans l’application des gestes barrières, de distanciation physique et du port du masque.
Après la crise sanitaire, la crise sociale semble inévitable…
Le chômage partiel a permis aux salariés de bénéficier d'une partie de leurs revenus : c’est une bonne chose. Il n’empêche que les aides publiques importantes accordées par l’État dans certains secteurs d’activités comme l’automobile et l'aéronautique, ne garantissent pas le maintien de l’emploi. C’est impensable !
Il est clair que cette pandémie risque, à terme, d’appauvrir le pays. Enfin, pas tout le monde… Pendant la crise, on a vu par exemple les bénéfices de certains grands groupes industriels et commerciaux augmenter de 50 à 60 % ! La répartition des richesses reste donc la question centrale à laquelle le gouvernement ne répond pas.
Ce contexte ne rend-t-il pas l’action publique plus délicate ?
Cette crise souligne surtout l’apport inestimable des collectivités territoriales. À Tremblay, par exemple, pendant le confinement, nous avons bien sûr accueilli dans les écoles les enfants des personnels soignants, mais aussi ceux des salariés travaillant dans le commerce.
Parfois, nous avons dû faire ce que l’État devait faire et n’a pas fait : je pense à la distribution de 85 000 masques aux Tremblaysiens et aux agents municipaux, par exemple. Bref, les maires ont joué un rôle essentiel dans cette crise. Si bien qu’aujourd’hui, plus personne ne dit qu’il y a trop de communes en France ! Les citoyens ont bien conscience qu’en démocratie, l’échelon local est primordial.
Pourquoi était-il important de rouvrir les écoles aux premiers jours du déconfinement ?
La vie scolaire et l’apprentissage des savoirs sont essentiels. Surtout dans nos territoires, où le nombre d’élèves en difficulté, voire en décrochage scolaire, est élevé. Laisser ces enfants éloignés de l’école trop longtemps aurait pu, à terme, les mettre dans de plus grandes difficultés encore. J’ai donc proposé que la ville s’inscrive dans les orientations générales proposées par le Gouvernement.
À partir du 18 mai, nous avons donc commencé à rouvrir progressivement les écoles, en tenant compte de l’avis des enseignants et des parents d’élèves et dans le respect absolu des protocoles sanitaires très stricts mis en place. Je ne regrette pas cette décision, prise par 80 % des maires de France.
Vous venez d’être réélu maire. Quelles sont les grandes orientations de cette mandature qui s’ouvre ?
Je veux d’abord remercier les Tremblaysiens qui m’ont une nouvelle fois fait confiance, à plus de 75 %. Cela prouve que notre action municipale est appréciée. Je souhaite à ce sujet qu’il y ait un travail plus collectif de l’équipe municipale. Naturellement, il me revient en premier lieu d’en être l’animateur. Concernant les projets à proprement parler, nous allons terminer l’aménagement du nouveau parc urbain, achever la restauration scolaire à l’école Anatole-France, poursuivre la modernisation du pôle commercial Franprix rue Berlioz et lancer la construction d’une résidence à échelle humaine qui ne dénature pas le site pavillonnaire des Cottages.
Nous allons aussi travailler sur le projet d’une nouvelle école dans le quartier du Vert-Galant et installer dans l’ancienne annexe du collège Romain-Rolland, rue d’Anjou, des activités sociales et culturelles pour les habitants du quartier et au-delà. Toujours au Vert-Galant, nous allons mettre en place un premier budget participatif, à titre expérimental. Au niveau territorial, je vais continuer l’action pour la réalisation du Colisée, une salle de 8 000 places. Le projet avance. Paris Terres d’Envol va d’ailleurs choisir à la rentrée l’une des cinq équipes qui ont concouru à la réalisation du Colisée.
Il y a un sujet épineux qui revient sans cesse, c’est le pont du Vert-Galant…
C’est un problème central, qui dure depuis trop d’années. Même si cette question n’est pas de la compétence de la municipalité, je veux contribuer à animer l’action des pouvoirs publics, de la Région, du Département, de la SNCF et de la Ville de Paris, qui sont des partenaires essentiels sur ce projet. Pour être honnête avec vous, cela va prendre du temps.
Plus largement, le fil conducteur de l’action municipale va être étroitement lié à la question de la transition écologique. À la fois sur les aspects de l’agriculture dite urbaine, l’usage du vélo et la réduction du trafic automobile. Mais cela nécessite des transports en commun performants, réguliers et sûrs. Et donc, entre autres, l’indispensable modernisation du RER B.
Auteur : Pierre Grivot