Portrait
Voyage de classe à Balhi !
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© Serge Barthe - Ville de Tremblay-en-France
« Il ne me restait que 50 euros. Il faisait 51 degrés ! J’avais déjà couru 6 000 kms depuis Paris. Fruit d’une rencontre, on me conduit chez le prince d’Arabie Saoudite. » Les élèves de terminale du lycée professionnel Hélène Boucher sont captivés par le récit de Jamel Balhi, aventurier hors pair, bien connu des lecteurs du TMagazine.
Amenés à plancher sur un projet associant français, histoire-géo et arts appliqués autour des thèmes de l’identité et de la diversité, les lycéens ne s’imaginaient pas que leurs enseignants Soraya Ghodbane et Antoine Serre puissent leur trouver un invité incarnant aussi bien le voyage et la rencontre. Ayant traversé plus de 200 pays en courant en 30 ans, sac au dos et appareil photo en main, Jamel Balhi aime les rencontres et a à cœur de communiquer cette soif aux jeunes.
L’hospitalité, valeur universelle
Devant cette classe captivée, le nomade invétéré égrène ses anecdotes et périples plus impensables les uns que les autres : « Après quatre mois d’aventures, je dormais tous les soirs sur les bords de route, les bancs publics... C’est la seule fois où j’ai demandé l’hospitalité. Le prince d’Arabie Saoudite m’a donc offert 3 000 dollars, un appareil photo et, du même coup, un métier. J’avais 19 ans. À cette époque, mon projet, c’était de courir jusqu’à Shanghai pour boire une tasse de thé chez un copain chinois. Je me suis dit : avec cet argent, je vais aller au bout du monde ! »
Soucieux de transmettre un message, Jamel Balhi glisse régulièrement son point du vue sur la vie : « À la télé, on vous montre des superstars. On vous dit qu’il faut leur ressembler. En voyageant autour du monde, j’ai été inspiré jusqu’aux larmes par des inconnus. Beaucoup très pauvres, d’autres très riches. Ils m’ont donné des leçons de vie, offert un thé ou un café. J’ai aussi été ému de voir des enfants travailler 10 heures par jour dans une fabrique de vêtements en Inde. »
Le tour du monde en 80 minutes
Après un préambule déjà riche, il éteint la lumière et prend le micro pour faire défiler son montage photo qu’il commente de façon poétique et décalée : « Ça m’arrive de dormir dans les cimetières. Chacun est différent. Ici en Irlande, là au Pérou, en Patagonie au sud de l’Argentine. N’oubliez pas, il faut toujours dormir dans le sens des morts ».
Les images défilent : « Au milieu des sans-abris de New Delhi, capitale de l’Inde, invité par le propriétaire de l’hôtel le plus cher du monde aux Émirats arabes unis. Tandis que j’ouvre un œil au Danemark, deux jeunes enfants s’éveillent à Lima, capitale du Pérou. Leur famille est trop pauvre pour leur offrir un toit. Quand il n’y a pas d’eau courante à la maison, on lave son linge dans la rivière, comme ici en Afrique. Des toilettes publiques, j’en connais pas mal. En Inde, par exemple, on peut tout faire dans la rue, en liquide comme en solide. Au Japon, on peut régler la température de la cuvette et la puissance du jet d’eau. J’ai aussi trouvé des nouvelles méthodes pour se brosser les dents. Par exemple, au Niger on peut utiliser une brindille d’Acacia. En Inde, pays de la vache sacrée, certains utilisent de la bouse en guise de dentifrice ».
Expressions de dégoût dans la classe ! « En quittant Tremblay, j’ai découvert des petits métiers de rue qui ont disparu chez nous, comme nettoyeur d’oreilles, chercheur de poux professionnel au Pérou... »
Le monde, école de la vie
Ce tour du monde en accéléré a fasciné de bout en bout. Après les applaudissements, les questions des élèves fusent : « Quel est le dernier pays que vous avez visité ? Avez-vous eu peur de dormir dans un cimetière ? Combien de temps a duré votre tour du monde ? »…
Répondant à chacune, Jamel Balhi est tour à tour joueur ou philosophe : « J’ai une vision globale du monde qui n’est pas forcément celle que l’on vous livre dans les medias. Volontairement, je n’ai pas de télévision, je me nourris des réalités du monde pour m’instruire. Essayez d’avoir plusieurs sources d’informations, soyez critiques. »
Puis, s’adressant à un élève : « Karim et moi, on va partir sur les routes du monde ? La prochaine fois, c’est toi qui fait les photos et qui raconte à tous tes copains ce que tu as fait. On va voir et faire des super trucs, jouer au foot avec des conserves, dormir dans une cellule, manger avec des baguettes, prendre des notes sur un calepin... »
Ses camarades éclatent de rire. « Il faut avoir confiance dans les rencontres, être à l’écoute. Les gens qui m’ont hébergé, ce sont eux qui m’ont donné la philosophie de mes voyages. »
Voyagez en compagnie du globe-trotteur Jamel Balhi !
Petit florilège de photos décalées illustrant ses périples autour du monde. À consommer sans modération…
Auteur : Pierre Grivot