Parc urbain
L’art est dans le bois
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© Guillaume Clément - Ville de Tremblay-en-France
Véritable poumon vert de la commune et patrimoine commun des Tremblaysiens, le parc urbain change de visage. Les travaux qui ont débuté en février 2019 s’achèveront en mars prochain. Les Tremblaysiens ont été associés à ce projet de réhabilitation lors d’une large concertation. Une concertation qui s’est poursuivie cette année avec le choix de l’œuvre artistique qui sera réalisée dans le parc. Et c’est le projet de l’artiste japonais Tadashi Kawamata qui a été sélectionné.
Son œuvre est inspirée d’une pratique thérapeutique très populaire au Japon, le « shinrin-yoku » (littéralement « Bain de forêt ») qui consiste à entrer en contact avec les arbres pour se ressourcer. L’artiste qui travaille fréquemment dans les milieux naturels (voir interview ci-dessous) a réalisé des œuvres partout dans le monde, de l’Allemagne à l’Australie, en passant par l’Italie, le Canada ou la Belgique. En France, ses œuvres in situ peuvent être visitées à Chaumont-sur-Loire ou encore à Nantes.
« Œuvre à ciel à ouvert »
Pour le parc urbain, Tadashi Kawamata a pensé son œuvre tel un parcours au sein du bois tout au long duquel 25 cabanes et nids seront installés à la cime des arbres. Certaines de ses cabanes seront réalisées avec le bois tremblaysien. Pour une invitation aux promeneurs à lever les yeux, à repérer les changements au fil des saisons, etc.
« La réhabilitation du parc urbain est un projet phare et il ne pouvait s’envisager sans concerter la population, souligne Alexis Mazade, adjoint au maire chargé de la Culture et de la Démocratie locale. Avec la création de cette œuvre d’art par l’artiste japonais de renommée internationale, Tadashi Kawamata, le parc urbain sera désormais un peu plus qu’un parc ! Il sera une œuvre d’art à ciel ouvert, qui pourra être visitée par tous les Tremblaysiens et bien au-delà. Un lieu unique d’expression artistique en milieu forestier ».
Les habitants à l’œuvre
Ce projet s’est construit en associant un groupe d’habitants. Une manière concrète d'appréhender l’art contemporain.
Depuis février dernier, une vingtaine de Tremblaysiens se sont impliqués dans un groupe, Les Amis du bois, dédié au choix d’une œuvre d’art qui prendra place au cœur du parc réhabilité. Un processus qui a pris fin avec la sélection de l’œuvre du Japonais Tadashi Kawamata en juin. Guidé par Pascal Le Brun-Cordier, expert en ingénierie de projets artistiques, le groupe avait pour objectif de préciser la demande artistique et d’élaborer un cahier des charges : l’œuvre devait notamment être pérenne, participative et respecter l’environnement. Un travail mené sous l’égide des services de la culture et de la démocratie locale.
Partage des savoirs
Dans un premier temps, ces participants ont étudié le travail de 45 artistes de renom, inspirés par la nature ou l'intégrant dans leurs œuvres. Ils ont à cette occasion notamment soulevé des questions liées à la sécurité, à l’usage de l’œuvre. « Le parc est celui des habitants et ce projet artistique s’est donc construit de manière collective car les Tremblaysiens ont une expertise, souligne Danielle Bellini, directrice des affaires culturelles et de l'éducation populaire. Cette initiative a impulsé un partage des savoirs et suscité une émulation entre les participants, un espace d’écoute. » Et de préciser que « ces échanges leur ont permis de mieux comprendre l’art contemporain ».
Après une première sélection de 23 artistes, cinq plasticiens ont présenté leur proposition artistique lors d’une séance réunissant les élus, le groupe d’habitants, Pascal Le Brun-Cordier, les services de la culture et de la démocratie locale. Le projet de cabanes et nids de Tadashi Kawamata a recueilli le consensus de ce jury. La participation des habitants n’en est pourtant pas terminée. Afin de découvrir l’univers poétique de Tadashi Kawamata, le public aura l’occasion de participer à un temps festif en novembre au cœur du parc urbain. Lors de cette fête de lancement, les Tremblaysiens pourront aider l’artiste à préparer des cabanes. Un parcours autour de l’œuvre a également été imaginé pour les écoliers.

Lucienne Le Roux Habitante des Cottages
Je me suis engagée dans cette démarche de concertation depuis le début du projet du parc. Je trouve que c’est une chance d’avoir un tel parc et d’être consultée. D’autant que la municipalité tient compte de nos remarques. Mon choix s’était porté sur l’oeuvre de Tadashi Kawamata, car j’avais apprécié l’aspect participatif. De même qu’elle incite le public à se promener, à découvrir le parc. Les enfants pourront se l’approprier en faisant appel à leur imagination.

Alain Pidoux Habitant du Vieux-Pays
Avoir la possibilité de donner son avis sur une œuvre, de rencontrer des artistes de renom, c’est très agréable et impressionnant. Mais ce que j’ai le plus apprécié, c’est qu’on a suivi nos choix. J’avais opté pour l’oeuvre de cet artiste japonais. Celle-ci va inciter les gens à regarder en l’air, à avoir une autre vision du parc. En plus, cette œuvre est participative. Tout le monde va mettre la main à la pâte : les enfants vont pouvoir se raconter des histoires sur les cabanes.

Pascal Le Brun-Cordier, expert en ingénierie de projets artistiques
J’ai accompagné la ville et le groupe d’habitants dès le démarrage de ce projet. De nombreux échanges ont permis de faire mûrir collectivement ce projet. La proposition de Tadashi Kawamata est très étonnante, inspirante et pertinente. Son oeuvre va permettre aux habitants de vivre une expérience poétisée, les cabanes seront accessibles uniquement par l’imagination. Cette œuvre d’art va bonifier le parc en préservant son caractère forestier, sauvage.
« Une réserve pour les oiseaux »
Tadashi Kawamata revient sur la genèse de son projet artistique.

© Guillaume Clément - Ville de Tremblay-en-France
Quelle est l’histoire de votre œuvre, de ce projet ?
Je me souviens la première fois que je suis venu dans ce bois, j’ai ressenti une énergie particulière avec cette lumière. Il y a une atmosphère que je voulais conserver. J’aimerais que lorsque les gens viendront se promener, qu’ils emprunteront les chemins que prennent les animaux sortant des axes principaux, qu’ils se perdent un peu et que chemin faisant, ils aperçoivent des nids, des cabanes perchées dans les arbres. Ils pourront s’amuser à les chercher. J’espère que cela les fera revenir plus souvent dans le bois.
Les oiseaux pourront donc élire domicile dans les nids…
Oui. Ce que je trouvais aussi très intéressant dans le fait de réaliser ce projet à Tremblay, c’est que la forêt est très proche de l’aéroport CDG et les avions sont très perturbants pour les oiseaux. Ce bois peut être considéré comme une réserve pour les oiseaux. Je trouve très intéressante cette proximité, cette contradiction entre une zone aéroportuaire internationale et la tranquillité de cette forêt.
Pourquoi ce choix de créer dans ce type de milieu ?
J’aime inscrire mon travail dans la nature, je n’aime pas les grands monuments. J’aime m’appuyer sur ces environnements pour apporter de petits changements dans les sensations, pas de gros changements, mais de petites variations. Et avec les saisons, ces lieux changent, la lumière, l’ombre changent, tout comme notre regard. J’aime travailler in situ. Je ne suis pas un artiste qui travaille en atelier, je suis dehors, dans les espaces publics car j’aime beaucoup voir la réaction des gens, comment ils interagissent avec leur environnement. C’est quelque chose de très important pour moi.
Rencontre avec Tadashi Kawamata

Tadashi Kawamata en dates
1953 : Naissance sur l’île de Hokkaido au Japon
1992 : Il est choisi pour participer à la Biennale de Venise, l’une des plus prestigieuses manifestations artistiques d’Europe.
De 1998 à 2005 : Il enseigne à l’université des arts de Tokyo 2008 : Il crée une œuvre pour le Madison Square Garden à New York
De 2007 à 2018 : Il enseigne aux Beaux-Arts de Paris.
Auteur : Pierre Grivot - Aurélie Bourillon
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