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« La voix est l'instrument suprême »
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© Solène Renault
Vous collaborez avec Malia depuis près de 15 ans maintenant, comment a démarré votre duo ?
C’est elle qui est venue me chercher ; j’ai beaucoup de chance ! Elle avait entendu un de mes disques à New York, un disque écrit pour Liane Foly, chanté en anglais. Elle voulait ce sonlà. Elle m’a alors appelé en me disant qu’elle voulait travailler avec moi. Je lui ai demandé de m’envoyer quelque chose et, trois mois plus tard, alors que j’avais complètement oublié, je reçois un CD. Je l’ai écouté et je suis tombé sur les fesses.
Je me suis dit : « mais comment faire pour ne pas abîmer ça ? ». Elle chantait une chanson toute simple, sans accompagnement… Je dirais que c’est une des plus belles voix que j’ai rencontrée dans ma carrière. Une voix grave, cassée, avec des harmoniques aiguës. Sa voix couvre tout le spectre sonore, du bas jusqu’en haut, et c’est pareil avec ses émotions. Pour moi, c’est une des chanteuses les plus absolues qui soit.
Quel type de son cherchait-elle exactement ?
Un format qui soit jazzy mais « chanson », c’est-à-dire qui serve les mélodies. Quelque chose qui soit confortable pour une chanteuse, car parfois les groupes de jazz sont de tels virtuoses qu’ils font des choses un peu complexes derrière, ils tricotent des contre-chants, des choses comme ça. Moi, c’est assez simple, épuré.
Qu’allez-vous jouer à Tremblay ?
Un mélange de notre répertoire et des standards de jazz. La thématique c’est l’amour. Nous aurons à la fois des chansons de Billie Holiday, d’Ella Fitzgerald mais aussi de Jeanne Moreau, ainsi que les morceaux que nous avons créés, Malia et moi.
Vous avez sorti quelques albums en solo, mais votre carrière musicale est largement marquée par des collaborations et des compositions écrites pour d’autres artistes. Qu’est-ce qui vous plaît tant dans le fait d’écrire pour les autres ?
La voix est pour moi l’instrument suprême. Même quand je suis derrière mon piano, j’essaie de me dire que c’est une chanteuse. J’adore le jazz, je suis un improvisateur, je me suis inspiré, par exemple, pour mon dernier album perso, qui est instrumental, de musiques arméniennes de mes ancêtres, mais j’adore les mélodies et les voix.
Les mélodies ne sont jamais aussi bien servies que par des voix. Et, quand j’accompagne une chanteuse, je suis le plus heureux des hommes. Il y a des pianistes qui peuvent se sentir frustré mais, moi, au contraire, j’adore laisser de la place à la voix.
Parmi vos nombreuses activités, quelle est celle qui vous apporte le plus de plaisir ?
Être sur scène et jouer de la musique. Quand vous êtes sur scène, c’est là qu’il se passe des choses. Le public vous met dans un état… C’est de la tension, c’est fatigant mais il vous pousse à aller chercher des choses que vous ne soupçonniez pas avoir en vous. C’est régénérant. Cette fatigue est une saine fatigue, comme une randonnée en haute montagne. À la télévision, on a l’impression qu’on vous a fait une prise de sang, qu’on vous a enlevé de l’énergie et que ce n’est pas revenu.
Sur scène, vous recevez et, surtout, vous produisez une musique que vous n’auriez pas produite autrement, car ça s’est passé ce soir-là, dans cette salle-là, avec ces gens-là. Parfois, ce n’est pas exactement ce que l’on voulait produire, on trouve ça moins bien que d’autres concerts, mais l’idée c’est toujours d’essayer de convoquer des énergies nouvelles pour essayer de faire le mieux possible. Avec Malia, chaque soir est différent.
Quels sont vos prochains projets musicaux ?
J’ai sorti récemment un album instrumental, Apatride, j’ai par ailleurs beaucoup de concerts prévus, et puis je vais certainement travailler sur d’autres compositions avec des projets de label. J’ai créé un label qui s’appelle Mad Chaman et j’ai ouvert une résidence à l’année à Chamonix, je serai donc beaucoup avec des artistes, et quand il y a de beaux projets, j’ai envie de les accompagner.
Malia & André Manoukian au Théâtre Louis Aragon - 12/01/18
