Presque un demi-siècle sépare la naissance de Souleymane Diamenka, en 1974 à Dakar, et la sortie chez Points de son livre Habitant de nulle part, originaire de partout. " 2021, c'est l'année où s'est exaucé mon voeu. Depuis tout petit, je veux devenir poète et avoir mon recueil de poèmes qui soit bien accueilli ", confiait récemment le Bordelais d'origine peule.
Modeste, le poète-slameur qui, du haut de ses 47 ans, affiche un parcours d'artiste nomade, à l'image du peuple peul. Originaire de partout, en somme ! Tour à tour rappeur (il fit la première partie de NTM en 1991 !), danseur hip-hop, acteur, circassien... et enfin poète-slameur, au moins depuis 2007, avec la sortie de son premier album, L'Hiver peul. Modeste et talentueux, vraiment, car il y a aussi eu des ouvrages coécrits, qui contribuent sacrément à élever le niveau d'émotion poétique : J'écris en français dans une langue étrangère en 2007 et Écrire à voix haute en 2013.
Que l'on goûte, lise et écoute ça par exemple : " Si quelqu'un te parle avec des flammes, réponds-lui avec de l'eau / Sache que le seul combat qui se gagne, c'est le duel qui devient duo / (...) Si quelqu'un te parle avec des flammes, réponds-lui avec de l'eau ; demain, il sera des nôtres. " Voilà un court extrait d'Habitant de nulle part, originaire de partout, qui contient des textes de L'Hiver peul , mais aussi de nombreux poèmes inédits de Souleymane Diamanka.
Surprise avec Hamid Ben Mahi
Comment en est-il arrivé là ? L'origine, c'est donc Dakar, d'où le père de Souleymane Diamanka est parti pour la France afin de devenir ouvrier chez Ford, une semaine avant que son fils ne vienne au monde. Celui-ci ne rejoindra Bordeaux et la cité des Aubiers que deux ans plus tard. Il grandira en français certes, mais aussi au son de la langue peule grâce à des cassettes enregistrées : " C'étaient nos cours, en fait ! Mon père savait que tout passait par la langue. Lui passait énormément de temps à l'usine, nous on était à l'école et on ne se voyait pas beaucoup. On ne pouvait pas faire les veillées comme au village ; du coup, il a enregistré sa voix sur des cassettes : l'histoire des Diamanka, la généalogie des Peuls... S'il avait été un littéraire, il nous aurait offert des livres. "
Les livres, ce sera finalement Souleymane qui les aura offerts aux siens, et à nous tous. Que les amateurs du slameur soient rassurés, les textes et l'écriture de Diamanka font entendre sa musique singulière. On le vérifiera sur la scène du TLA, qui programme donc Habitant de nulle part, originaire de partout le 19 novembre prochain, avec une belle idée derrière la tête : " C'est parti de la soirée du lendemain, le 20 novembre, avec Chronic(s) et Chronic(s) 2, du chorégraphe et danseur Hamid Ben Mahi. Il part avec nous sur un projet qui s'appelle "Pourquoi tu danses ?" ".
Souleymane et Hamid ont grandi et travaillé ensemble à Bordeaux ; depuis, chacun a fait son chemin, explique-t-on au TLA. " Pourquoi tu ne danses plus, Souleymane ? ", pourrait gentiment questionner l'ami Hamid. Ce dernier s'invite ainsi dans le récital du slameur avec un autre compagnon de route, le batteur Roger Biwandu, pour une belle surprise partagée avec le public du théâtre. Pas de duel, mais bien un duo puis un trio, pour un tout en flammes et en danse, avec des mots...
Habitant de nulle part, originaire de partout, de Souleymane Diamanka au TLA le vendredi 19 novembre à 20h30.